Le 16 avril 2025, en Conseil des ministres, le ministre de l’Économie Éric Lombard et la ministre chargée des Comptes publics Amélie de Montchalin ont présenté le projet de loi relatif aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l’année 2024 (PLRG). Pour la 19e année consécutive, la Cour des comptes certifie les comptes de l’État avec réserves, pointant 5 anomalies significatives et 11 insuffisances d’éléments probants. La répétition de ces réserves soulève une fois de plus la question : combien d’années encore faudra-t-il pour mettre réellement en œuvre une comptabilité publique fiable, sincère et fidèle ?
Des efforts budgétaires… mais à quel prix ?
Certes, le solde budgétaire s’améliore légèrement par rapport à la prévision de la loi de fin de gestion (- 155,9 Md€ contre -162,4 Md€), mais reste très dégradé comparé à la loi de finances initiale. Ce « rattrapage » est le fruit de mesures de « maîtrise de la dépense » qui, concrètement, se traduisent sur le terrain par :
- des coupes dans les moyens de fonctionnement des administrations,
- une pression accrue sur les services déconcentrés,
- et une dégradation continue des conditions de travail des agents de la DGFIP, pourtant en première ligne dans la gestion et l’exécution budgétaire.
Un résultat patrimonial « en amélioration »… au prix d’une politique d’austérité
Le résultat patrimonial 2024 s’améliore, notamment en raison de la baisse des charges d’intervention nettes (-23,3 Md€). Il faut lire entre les lignes : cette « amélioration » repose avant tout sur des coupes dans les aides publiques, les subventions, ou les dépenses sociales. En parallèle, les charges de fonctionnement nettes et les charges financières explosent (+19,1 et +10,2 Md€ respectivement), ce qui traduit une gestion coûteuse et peu efficiente de la dette, sans remise en cause des choix politiques qui en sont à l’origine.
Un bilan en dégradation constante
Le passif de l’État atteint un niveau record : près de 2 000 Md€ de dette, contrebalancé uniquement par une hausse de l’actif liée à la valorisation d’immobilisations. Mais cette présentation masque un fait central : la dette publique limite la capacité de l’État à investir dans les services publics et sert chaque année de justification à des politiques de restrictions budgétaires.
Revendications CFTC DGFIP : sortir du cycle de l’austérité comptable
La CFTC DGFIP ne conteste pas l’importance de la transparence budgétaire ni la nécessité de comptes publics fiables. Mais elle refuse que cet objectif serve de prétexte à l’appauvrissement des missions publiques, à l’usure des agents, et à la poursuite d’une politique de réduction aveugle de la dépense publique.
Nous revendiquons :
- Un plan pluriannuel de renforcement des effectifs de la DGFIP, avec des recrutements significatifs pour répondre aux exigences croissantes de gestion, de contrôle et de conseil.
- Des investissements massifs dans les systèmes d’information, pour garantir une comptabilité publique réellement modernisée, sécurisée, et auditable – condition indispensable pour lever les réserves de la Cour des comptes.
- Une revalorisation immédiate des carrières et des rémunérations des agents, à la hauteur de leur responsabilité dans l’exécution budgétaire et comptable de l’État.
- Une réforme de la gouvernance budgétaire, pour donner davantage de poids aux agents de terrain, aux services déconcentrés et aux représentants syndicaux dans la définition des priorités de gestion.
- Une sortie du dogme de la réduction de la dépense publique, qui sacrifie les missions de service public sur l’autel de la dette, sans poser les vraies questions sur la justice fiscale et l’efficacité des politiques économiques.