Les organisations syndicales avaient été tenues à l’écart de la préparation du précédent contrat d’objectifs et de moyens (COM) par la direction générale (DG). Ceci au mépris du droit qui prévoit que « les fonctionnaires participent par l’intermédiaire de leurs délégués siégeant dans des organismes consultatifs à l’organisation et au fonctionnement des services publics ». La DG avait elle considéré que son contrat triennal ne structurait pas suffisamment l’organisation et le fonctionnement des services publics pour s’éviter une concertation avec les OS représentatives ?
Pour son nouveau COM (quinquennal cette fois, ndlr), la DG a choisi de poursuivre dans la même voie …avec une petite inflexion : pour donner le change, elle a consenti à informer a minima les OS représentatives, après avoir préalablement fixé seule la philosophie et les objectifs du COM ! Un COM que la DG aurait souhaité signer avant la fin de l’année 2022, mais qui ne le sera qu’à la fin du 1er trimestre 2023.
Ce 10 janvier 2023, était donc prévue en guise de dialogue social, une demi-journée de présentation d’un diaporama superficiel présentant les 7 grands axes et 18 objectifs (cf. tableau en annexe) à grand renfort de mots valises et de nuages de mots… Bien sûr le Grand remue-méninges (GRM) a été mobilisé pour légitimer des orientations que la DG souhaite donner à la DGFiP pour les 5 prochaines années et qui sont pour beaucoup celles que la DG souhaitait imposer… avant le GRM. Quel heureux hasard ! La ficelle est un peu grosse.
Sur l’informatique, la DG se défend néanmoins d’avoir pris pleinement conscience de l’ampleur des problèmes rencontrés par les agents grâce au GRM… Une chose est sûre, comme représentants du personnel, nous ne cessons GT après GT (mais pas seulement) d’alerter la DG sur la gravité des dysfonctionnements informatiques… Il n’y a pas pire sourd que celui qui ne veut entendre.
Unanimes, les OS (CFDT-CFTC, Solidaires, FO, UNSA-CGC) ont dénoncé tant l’absence de concertation, qu’un futur COM déjà bouclé qui précède une préparation sous cape. La DG s’en est ardemment défendue en arguant que le COM n’était pas encore signé avec la direction du Budget (DB) et le secrétariat général (SG). Pour la DG, si les documents présentés restent encore superficiels, c’est d’ailleurs que des éléments demeurent à fixer. Arguments séduisants mais quelque peu fallacieux. Si le COM n’est effectivement pas encore signé, les discussions avec la DB et le SG sont déjà très avancées avec un cadrage budgétaire a priori fixé depuis le 9 août 2022* et des orientations stratégiques structurantes parfaitement définies. S’y ajoutent un certain nombre de déclinaisons pratiques présentées comme ressortant du GRM, ou d’autres déjà actées dans des groupes de travail métiers n’associant aucunement les représentants des personnels (* : dont nous n’avons connaissance qu’au titre du seul budget 2023 et de l’enveloppe globale allouée à la transformation numérique et le renforcement des moyens informatiques).
Ainsi donc, si la DG avait voulu faire une présentation correcte aux représentants des personnels, ou même tenter de se rattraper en nous associant à la dernière minute aux dernières discussions, elle aurait pu, par exemple :
- En premier lieu, nous faire une présentation détaillée du cadrage budgétaire qui contraint le COM ;
- Nous expliciter la philosophie de chaque axe et objectif, les buts poursuivis et présenter les modalités pratiques de mise en œuvre envisagées mais encore « négociables » ;
- Pour ce faire, nous fournir des documents préparatoires complets et prévoir une journée pleine et entière de discussions.
Au lieu de cela, elle a préféré se contenter d’enchaîner tout au long la matinée nombre de non-réponses.
Au final, nous n’aurons rien appris lors de ce GT qui ne nous soit déjà connu ! Notre délégation CFDT–CFTC constate qu’une fois encore la DG a préféré le simulacre du dialogue à une véritable concertation. Cependant, nous retenons tout de même de ce GT que la DG n’a aucune intention d’inclure un volet reconnaissance professionnelle des agents dans le futur COM. Si elle est prête à reconnaître l’engagement des agents et recherche à accroître l’attractivité de la DGFiP pour attirer de nouveaux « Talents », elle ne compte en tout cas pas s’en donner les moyens en termes de rémunérations.
Pour justifier l’absence de volet reconnaissance professionnelle, la DG indique tout d’abord qu’elle ne considère pas que le COM soit le meilleur véhicule pour ce faire. Elle se cache ici derrière les possibilités de négociations avec les OS. Mais ne préférait elle pas plutôt mener un projet mettant en place un système de reconnaissance individuelle via, par exemple, une nouvelle prime « au mérite » ? En outre, la DG indique qu’avec -850 ETP en 2023 et -3000 ETP jusqu’en 2023, le budget est à l’os… Pour un peu, la DG voudrait nous faire croire que les effectifs augmentent !
Autre point sur lequel la DG s’engage, la stabilisation du « Nouveau réseau de proximité » ! Il faut avouer que cette saignée sans précédent laisse le réseau déconcentré exsangue et encore groggy. Il demeure une centaine de services de gestion comptable (SGC) à mettre en place d’ici fin 2023 et beaucoup ont encore bien du mal à fonctionner. En outre, le positionnement des conseillers aux décideurs locaux (CDC) et leurs missions demeurent encore à mieux définir. Evidemment, aucun retour en arrière n’est envisagé malgré les difficultés et l’évident recul que représente le NRP pour le service aux usagers et l’accompagnement des partenaires.
Et là, il faut bien dire que le futur COM ne manque pas d’air ! Car, sans démordre de son grand déménagement territorial qui laisse un grand vide à la place de l’ancien réseau de proximité, la DG se propose pêlemêle de : « Garantir aux usagers le meilleur accès aux informations et services de la DGFiP, adapté à leurs besoins », d’« améliorer le service à destination des collectivités locales », d’« étendre les services de la DGFiP aux autres partenaires », de « mieux accompagner les usagers particuliers » et de « soutenir les entreprises »…
Avec quels agents ? En 2027 ce seront en effet près de 35 000 suppressions d’emplois qui auront été réalisées depuis 2008 ! Dans quels services ? Il ne restera en effet plus qu’un filet à grosses mailles de SIP, de SIE ou encore de SGC !
Peu importe, les solutions sont toutes trouvées : l’informatique (enfin, quand cela fonctionne…) et bien sûr l’offre multicanal qui seront là pour accomplir le miracle d’un service renforcé, d’un conseil adapté, d’une présence renouvelée… et combler le grand vide laissé par les services déménagés. On se pince pour ne pas rire – jaune – devant cette vision éthérée d’une géographie toute numérique et d’une humanité toute dématérialisée.
Entendons nous bien, non qu’il ne faille faire progresser nos outils informatiques et donner aux agents, aux usagers et aux partenaires les moyens d’exercer leurs missions pour les uns, d’accomplir leurs devoir et d’effectuer leurs demandes pour les autres ou encore d’entrer en relation les uns avec les autres. Mais si l’informatique est un outil essentiel au XXIe siècle, en particulier pour une administration comme la nôtre, il ne saurait être en soi sa raison d’être et contraindre les acteurs à s’y conformer. C’est bien au service des agents, des usagers et des partenaires que les NTIC doivent être et c’est bien pour permettre d’améliorer leurs relations qu’elles doivent être conçues, non pour remplacer les uns, ou asservir les autres.
Enfin las, après une matinée de « non discussion », quelques espoirs d’approfondir le dialogue ont quand même vu le jour avec la promesse de futurs groupes de travail : sur les différents objectifs figurant au COM (SIP, SIE, contrôle fiscal, attractivité de la DGFiP), et sur les indicateurs en particulier. Nous serons au rendez-vous et espérons que la DG le sera également. Mais, cette fois avec la réelle intention d’entrer en concertation avec les représentants du personnel…