Avenir des SIP

Au coeur de la fusion des directions générales de la Comptabilité publique et des Impôts en 2008, le service des impôts de particuliers (SIP) devait donner corps au « guichet fiscal unique » (GFU) pour les particuliers et promettait un accueil généraliste et spécialisé destiné à accompagner les contribuables.

L’Administration annonçait à l’époque un réseau de 750 SIP crées sur 3 ans… Il y en eut un peu moins et, aujourd’hui, avec quelques 400 SIP maillant grossièrement le territoire nous en sommes loin. Reste la promesse initiale – il faut bien le dire non tenue – de la mise en œuvre de SIP articulés autour d’une mission « accueil » dotée des moyens nécessaires pour accompagner les usagers dans leurs démarches, et des services exsangues après 15 années de réductions d’effectifs, de suppressions d’implantations et de fusions de services…

DES SIP EN DÉFICIT DE MOYENS

Pour la direction générale (DG), l’objectif du groupe de travail (GT) du 17 février était de présenter aux représentants des personnels les lignes de force de son projet pour les SIP et de tracer leur avenir. Ce groupe de travail était donc le bienvenu alors que les agents exerçant dans les SIP s’inquiètent fortement des évolutions en cours et ressentent bien souvent celles-ci comme les prémices d’une disparition à venir ou tout au moins d’une transformation telle qu’elle équivaudrait à une disparition pure et simple.

En réponse à nos propos liminaires (cf. infra)la DG a tout d’abord tenu à confirmer que les SIP demeuraient un des services essentiels de la DGFiP et qu’ils en constituaient toujours une « vitrine ».

Cependant, considérant les récentes évolutions (prélèvement à la source – PAS, déclaration automatique, suppression de la taxe d’habitation sur la résidence principale –THP, et de la contribution à l’audiovisuel public – CAP), la DG a réaffirmé qu’elle considérait nécessaire de redéfinir le périmètre des missions excercées par les SIP, et que des marges existaient pour réaliser de nouvelles tâches.

L’alliance CFDT-CFTC a contesté à plusieurs reprises la vision selon laquelle du « temps agent » serait disponible. En effet, les SIP étaient en difficulté avant le PAS, la déclaration automatique et la suppression de la THP-CAP, et les suppressions d’emplois n’ont pour autant jamais cessées, rendant le plein exercice de l’ensemble des missions dévolues aux SIP toujours plus impossible. En outre ces évolutions ne s’accompagnent pas de la suppression de toutes les tâches afférentes et d’autres charges sont apparues en lien avec GMBI et devrait apparaître avec le recours accru à la taxe sur les logements vacants (TLV) et la taxe d’habitation sur les logements vacants (THLV). Il est donc illusoire de considérer que les SIP disposent de marges pour absorber de nouvelles missions.

OBJECTIFS DE LA DIRECTION GÉNÉRALE

La DG définie son projet pour les SIP comme un recentrage autour de leur cœur de métier :

  • Accueil généraliste multicanal : le SIP est le « point d’entrée naturel et privilégié » des particuliers, sauf pour l’accueil téléphonique qui relève – dans la vision de la DG – des centres de contact ;
  • Gestion : fiabilisation des informations (contrôle qualité des données), accompagnement des contribuables ;
  • Contrôle : dans le prolongement de la gestion, la lutte contre la fraude et les erreurs déclaratives et une « mobilisation accrue » sur le CSP de régularisation (relance amiable, montant sur montant, bulletins de recoupement, etc.) ;
  • Recouvrement : recouvrement amiable et pré-contentieux ;
  • Contentieux fiscal et gracieux dans le prolongement de la gestion fiscale ;
  • Comptabilité du SIP.

La DG veut également que les SIP développent l’accompagnement « pro-actif » des contribuables dans l’usage du numérique via en particulier la co-navigation sans plus de précisions. Il est néanmoins assez peu imaginable que les agents des SIP puissent convertir au numérique des usagers qui sont soit âgés, soit en rupture aves les normes de la communication administrative voire en situation d’illetrisme. Cette intention ressemble plus à un vœu pieux fait pour complaire à quelque haute autorité politique ou administraive, plutôt qu’à une réelle connaissance des situations concrêtes.

De manière plus paradoxale, la DG veut également que les SIP étendent leur périmètre d’accueil au champ couvert par les espaces France services (EFS). Sur ce point la DG a néanmoins précisé qu’il s’agissait d’assurer un accueil primaire, essentiellement d’orientation, et qu’il ne s’agissait pas d’accompagner les usagers dans leurs démarches administratives ne relevant pas du SIP.

Ce recentrage autour de ce que la DG considère comme le cœur de métier des SIP, l’a conduit à préciser que les missions foncières (en dehors de l’obligation déclarative faite au propriétaires à compter du 01/01/2023), les amendes et le CSP d’initiative ne relèvent pas du champ du SIP. Si ces clarifications apparaissaient comme souhaitables, en particulier concernant la mission amendes, des problèmes risquent de persister en raison des difficultés rencontrées par les services fonciers et amendes qui sont en sous-effectifs. En outre l’accueil des redevables « amendes », en particulier lorsque les services amendes sont implantés au niveau du SIP, continuera de poser questions et la DG n’a pas apporté à ce stade de solution aux difficultés rencontrées.

Par ailleurs, si les SIP ne sont pas, en l’état de leurs effectifs, en capacité d’assumer une part du CSP d’initiative réservé actuellement aux PCRP, il est dommageable que cette mission d’intérêt pour l’État, les citoyens et les agents manque globalement de moyens.

CSP&FRAUDE

Concernant les contrôles dévolus aux SIP, même si la DG reconnaît que les SIP peuvent ponctuellement avoir une charge de travail limitant leurs capacités de contrôle, elle considère qu’il existe des marges de progression pour réaliser du CSP de régularisation.

En outre, concernant les fraudes déclaratives et en particulier de fraudes aux crédits d’impôt, la DG a bien identifié la difficulté et proposera dès cet année des moyens techniques permettant d’isoler certaines fraudes simples aux CI.

TÉLÉPHONIE

Les centres de contact (CC) ne sont pas en mesure d’assumer l’ensemble des appels téléphoniques, tant pour des raisons de charge que de technicité. Dans ce contexte les directions locales et en particulier les SIP sont fortement sollicités. Des cellules téléphoniques départementales ont parfois été mises en place. La DG s’est engagée à étudier la question est à fixer des orientations voire des prescriptions si nécessaires. L’alliance CFDTCFTC sera particulièrement attentive aux conditions de travail et de rémunération des agents exerçant dans ces cellules téléphoniques départementales.

POLYVALENCE

La DG entend « décloisonner » les SIP, comprendre favoriser la polyvalence des agents dans l’accomplissement de leurs missions d’assiette et de recouvrement… L’organisation en secteurs d’assiette est rejetée par la DG. Alors qu’à l’origine des SIP le respect des filières avait été érigé en principe permettant de conserver le niveau de technicité souhaité et que la plupart des services de la DGFiP sont aujourd’hui engagés dans des processus de spécialisations, parfois très poussés, cet objectif de polyvalence dans les SIP apparaît paradoxal voire incongru. Il répond en réalité à un déficit de moyens bien que la DG s’en défende et invoque des synergies entre l’assiette et le recouvrement. En tout état de cause atteindre la polyvalence est une gageure tant la complexité des missions et le manque de temps la rendent impossible.

LIAISONS

La DG veut également « connecter » les SIP avec les autres services de la DGFiP en charge des particuliers (foncier, recouvrement forcé, contrôle). Il s’agit essentiellement de partager les informations disponibles dans un optique de fiabilisation, mais également d’amélioration du service rendu au contribuable et du contrôle. Si l’objectif peut être partagé, l’alliance CFDTCFTC a néanmoins insisté sur les moyens humains et techniques que nécessitent une coopérations inter-services plus poussée.

INFORMATIQUE

Côté informatique, la DG veut développer des outils facilitant l’exercice des missions :

  • Un outil de relation usagers permettant d’ « assurer la traçabilité des échanges » avec le contribuable.
  • Un tableau de bord permettant de piloter l’activité grâce à l’agrégation d’informations figurant dans le lac de données.

Si ces outils peuvent avoir un grand intérêt pour les agents – à condition de ne pas les utiliser pour suivre l’activité des agents plutôt que remplir les missions – et la qualité du service rendu, à ce stade aucun calendrier précis de développement ni encore moins de déploiement n’a été avancé. Au demeurant, au regard des difficultés rencontrées par la DG dans les développements en cours on peut craindre que ces annonces prometteuses soient longues à accoucher concrètement.

FORMATION&DOCUMENTATION

Côté formation et gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences (GPEEC), la DG a reconnu que des travaux étaient nécessaires en la matière et que la formation devait être renforcée mais sans rien préciser.

Côté documentation, la DG annonce la création d’un « SIP en ligne » sur le modèle de « SIE en ligne » qui centralisera en ligne des informations consolidées (calendrier des tâches, les opérations à réaliser et les interlocuteurs compétents, etc.).